Mon intervention au Conseil de Paris sur le budget supplémentaire de la Ville de Paris (juillet 2020)
Madame la Maire, mes chers collègues,
Je voudrais d’abord remercier mon groupe, mais aussi l’ensemble de mes collègues de tous les groupes au sein de la 1ere Commission, de m’avoir accordé leur confiance pour présider cette Commission qui a vocation à couvrir des enjeux essentiels : les finances, bien sûr, le premier des enjeux démocratiques, les ressources humaines de la Ville, mais aussi le commerce et l’artisanat, l’économie circulaire et l’innovation.
Je profite de cette intervention pour partager avec vous quelques réflexions sur la façon dont nous, élus, pourrons bien faire notre travail au sein de la 1ere Commission au cours de cette mandature.
- La première des ressources, bien sûr, c’est le temps. 3 points à ce sujet
D’une part, il n’est pas raisonnable, Madame la Maire, que les élus ne disposent que si tardivement des documents budgétaires, et cela même si je comprends les contraintes particulières qui ont cette année marqué la préparation de ces documents. Plusieurs centaines de pages à étudier en 3 jours avant la réunion de commission, ça n’est pas raisonnable, ça n’est pas du tout au niveau des exigences démocratiques
D’autre part, reconnaissons-le : nous examinons aujourd’hui 23 juillet le compte administratif d’un exercice budgétaire qui s’est achevé voici plus de 6 mois. Je nous mets au défi de trouver une entreprise où l’on prend connaissance des résultats de l’année passée au cours du second semestre et qui navigue à vue dans l’intervalle. Et nous sommes beaucoup plus qu’une entreprise : une collectivité de plus de 2 millions d’habitants, plusieurs dizaines de milliers d’agents publics et une dizaine de milliards de budget, qui est piloté par une assemblée élue.
Enfin et d’une manière plus globale, si nous ne voulons pas être une chambre d’enregistrement, il nous faut beaucoup plus de TEMPS REEL dans l’information budgétaire. Je crois comprendre que, sous les mandatures précédentes, la commission des finances était destinataire d’un document présentant, par exemple, l’exécution des DMTO ou le suivi des dépenses d’investissement. Cela ne me paraît pas suffisant. Je pense que nous devons faire un travail collectif, au sein de la Commission des finances, pour définir une batterie d’indicateurs qui permettent véritablement le pilotage, dont nous serions destinataires tous les mois, et qui nous permettraient par exemple d’organiser une discussion collective une fois par trimestre autour d’un document de synthèse d’une vingtaine de pages.
- La seconde des ressources importantes pour un bon contrôle démocratique, c’est la clarté.
Nous avons, au sein de la collectivité parisienne, 3 types de documents budgétaires – le budget primitif, le budget supplémentaire et le compte administratif, qui ont 3 formats différents. Pour prendre la mesure des évolutions dans le temps, pour porter des appréciations pertinentes, ça n’est pas la bonne façon de procéder il me semble.
Et si certains documents sont de bonnes synthèses administratives, ou parfois politiques comme on le voudra, nous restons sur notre faim et ne disposons pas de toute l’information qui permettrait une analyse précise et exhaustive.
Il nous manque des annexes sur des politiques publiques essentielles, comme le logement, la propreté ou la sécurité.
Par ailleurs, certains agrégats qui représentent 300 000 euros font l’objet d’une explication détaillée superflue quand l’évolution de certains indicateurs essentiels en matière de recettes ou de dépenses est passée sous silence. Selon les documents budgétaires, on déplace le projecteur toujours différemment, et tant de choses restent dans l’ombre. A tout le moins, comparer et apprécier est mission impossible.
Vous le dénoncez à raison, Madame la Maire, la Ville de Paris s’est vraiment « faite avoir », si vous me permettez cette expression familière, par l’Etat. Et pas qu’un peu. Et pas qu’une fois. Chaque année. Depuis longtemps. Et toujours dans le même sens, au détriment des finances parisiennes, qu’il s’agisse de l’évolution de la fiscalité ou des dotations.
Mais de notre point de vue d’élus, ces hold-ups à répétition, à hauteur de centaines de millions et dont l’impact sur une mandature se compte plutôt en milliards, se sont faits dans l’opacité la plus totale. Quels ont été les termes du débat ? pourquoi avons-nous été aussi mauvais ? Ne vaudrait-il pas mieux, Madame la Maire, plus de transparence en amont, plutôt que de nous convier à pleurer ensemble une fois que la Ville de Paris a perdu et que nos marges budgétaires se retrouvent une nouvelle fois rétrécies ? A méditer peut-être, surtout tant on se doute bien que, des tentatives de hold-up, il y en aura d’autres.
Quelques commentaires, ensuite, sur ce budget supplémentaire.
La vérité c’est que, compte tenu de la gestion sous la mandature précédente, la Ville n’avait pas un fifrelin pour répondre aux besoins des habitants et des entreprises parisiennes lorsque l’épidémie a surgi.
Et cela malgré 1 milliard pris aux bailleurs sociaux sur la mandature et environ 1 milliard de ventes du patrimoine parisien.
On rappellera que les charges d’emprunt, c’est près de 230 millions d’euros, soit l’équivalent du fameux « plan de relance ».