Mon intervention au Conseil de Paris, novembre 2020
Madame la Maire,
Depuis un siècle et demie, « Fluctuat nec mergitur » est notre devise. Aujourd’hui, après 6 années où vous vous êtes révélée – avec tout le respect dû à vos fonctions- une piètre timonière- , les finances de Paris sont malheureusement en perdition.
Les finances, cela n’a jamais été votre préoccupation principale. Mais ce sont de finances dont aujourd’hui, les entreprises auraient besoin pour faire face à la crise sanitaire qui a frappé Paris plus que les autres communes françaises. Ce sont de finances dont toutes celles et ceux qui ont perdu leur emploi auraient besoin pour payer leurs loyers, leurs factures. Ce sont de finances dont auraient besoin tant de jeunes parisiens privés d’entrer sur le marché du travail, et tant d’autres priés d’en ressortir par des employeurs au bord de la faillite. Ce sont de finances dont auraient besoin tous ceux qui accepteraient, malgré tout, d’investir.
Et demain, lorsque la crise sera passée, ce sont de finances dont Paris aura besoin pour rebondir, alors que vous ne lui léguerez que des impôts et de la dette.
Car oui, quand les plots jaunes dans nos rues auront vieilli, quand les palettes à l’absence de style inimitable auront pourri, quand des générations de pauvres végétaux auront flétri, votre bilan à Paris, ce sera la dette des Parisiens.
Aujourd’hui, nous examinons ce qui s’apparente à un rapport de désorientation budgétaire…
EN TOILE DE FOND : nous avons une IMPREVOYANCE CARACTERISEE DURANT LA DERNIERE MANDATURE avec des dépenses et un endettement qui filent. Bilan, les Parisiens doivent déjà rembourser, chaque année, l’équivalent de votre plan de relance. Et bientôt beaucoup plus.
L’arrivée de la pandémie a révélé au grand jour l’IMPECUNIOSITE de la Ville et L’IMPUISSANCE à faire face: AU MOMENT OU LA VILLE DEVRAIT ÊTRE AUX COTES DES SIENS, ELLE N’EN AVAIT PAS LES MOYENS.
Deux mois après le budget supplémentaire, en voici un autre, qui consacre une nouvelle dérive de 100 millions. (70M de manque de recettes !, près de 30 M de dépenses imprévues il y a 3 mois). 30 millions par mois, depuis 3 mois, sans que l’on n’ait pu prévoir ! Et encore on n’a pas vu l’impact du reconfinement.
Nous examinons aujourd'hui les perspectives, ou plutôt l’absence de perspectives, pour le budget 2021.
Elles sont placées sous le signe d’une grande irresponsabilité : Madame Hidalgo, vous avez pris votre plume ! « Monsieur le premier ministre, Cher Jean » ; s’il vous plaît, autorisez-moi à augmenter les impôts !
Le document que vous nous présentez aujourd’hui est celui de l’INSINCERITE BUDGETAIRE. Une insincérité qui, si elle est confirmée le mois prochain, menacera la légalité du budget primitif pour 2021.
Dans ce rapport en effet, vous n’y allez pas avec le dos de la cuiller. Ce n’est pas de la poussière que vous planquez sous le tapis, c’est des millions et des millions d’euros ! Désolée, mais ça se voit un peu.
- Les recettes, d’abord. Vous l’avez décidé : comme cette année 2020 a été un cauchemar, du coup, effaçons-là. Un coup de baguette magique. Dès le 1er janvier 2021, l’économie parisienne, l’immobilier, le tourisme repartiront à plein régime, comme si rien ne s’était passé, et vous pourrez les taxer allègrement, en augmentant les taux si nécessaire.
Mais rien n’est sincère !
- DMTO
Déjà, vos prévisions pour 2020 nous rendent un peu perplexe. Vous nous dites penser atteindre 1 650M (inscrits), moins 80 et moins 40, soit un réalisé de 1 530 millions. Nous ne pouvons qu’être dubitatifs, alors que la Chambre des notaires estime que le recul de la base taxable de 2019 à 2020 serait de 19% dans l’ancien et de 14% dans le neuf…
Cette estimation des Notaires rend également totalement insincère votre prévision de DMTO pour 2021, que vous fixez au niveau du CA 2019, soit 1 587 millions. On ne voit, ni dans les volumes de ventes, ni dans l’évolution des prix, ce qui pourrait fonder ce sursaut du marché immobilier. Il faudra nous expliquer : vous pensez qu’il y aura une augmentation du nombre des ventes ? une augmentation des prix ?
… ou, évidemment, une augmentation des impôts.
- La taxe de séjour, ensuite
Vous l’aimez bien, la taxe de séjour : vous l’avez augmentée à 2 reprises, en 2016 et 2018 et vous voudriez l’augmenter encore. En 2020, elle rapporterait 45 M, contre 95M constatés en 2019. Par rapport au BP 2020 : c’est moins 50 M (45 prévus dès le BS, 5M ensuite) .
Mais là aussi, on efface tout ! Pour 2021 : vous prévoyez allègrement 85 M, sur la base d’« un niveau de fréquentation touristique proche de 2019 ».
De qui se moque-t-on ?
En septembre, alors que l’on ne parlait, ni de deuxième vague ni a foriori de reconfinement, le CA de l’hôtellerie était en baisse de 82% par rapport à septembre 2019.
Même si nous souhaitons tous que tout se rétablisse dans le courant de l’année 2021, les 6 premiers mois au moins seront malheureusement à des niveaux bien inférieurs à ceux de 2019 et vous le savez !
Alors oui, la taxe de séjour, ça n’est pas l’essentiel des recettes de la Ville de Paris. Mais même pour 20 ou 30 millions d’euros qui pourraient rendre votre prévision un peu plus crédible, vous n’hésitez pas à mentir !
- Et le stationnement ?
Tiens, comme c’est étrange, le rapport budgétaire n’en parle pas du tout….
Au BS : vous prévoyiez une baisse des recettes de 60 millions. Entre le BS et la DM, vous avez été contraints de réviser vos prévisions de - 20 millions encore, soit 80 millions en moins au total. Et pour 2021, vous êtes toujours au niveau de 2019 ? Alors même que la circulation automobile est en baisse, que vous diminuez chaque jour le nombre de places en surface…
- Les recettes de gestion, maintenant
Pour 2021, vous prévoyez 1 470 M, soit - 4% par rapport à BP 2020, où 1 530 M étaient inscrits.
Mais c’est totalement insincère ! ce n’est pas du tout cohérent avec les conséquences malheureuses de 2020 ! Rappelons qu’au budget supplémentaire, vous avez dû ajuster de près de 90 millions d’euros ces recettes de gestion, et cela sans compter la nouvelle baisse des recettes de gestion de 23 millions dans la DM. Donc 110 millions de moins que ce qui était prévu.
Comment – je cite le budget supplémentaire –« Les adaptations contractuelles et les exonérations de redevances de concessions prévues pour les concessionnaires et les délégataires de la Ville », qui ont eu un impact de 40 M€ sur les recettes de la Ville » , n’auraient plus qu’un effet d’1 million d’euros en 2021 ?
- Et en plus, votre potion magique, les loyers capitalisés, a déjà été presque toute bue : on a la baisse des loyers capitalisés
- L’insincérité, elle est aussi du côté des dépenses, dont vous sous-estimez l’évolution
- Vous nous dites que les dépenses de personnel progresseront de 1%
Pourtant la Ville promet des revalos catégorielles…. (en plus GVT, revalo SMIC, prime de précarité contrats courts…)
Pourtant vous prévoyez des, créations de postes dans les nouveaux équipements + équipes de renfort dans les écoles
Pourtant aussi on va créer une police municipale….
On rappellera que les dépenses de personnel ont augmenté de 5M au BS….
SOIT IL Y A DES SUPPRESSIONS D’EFFECTIFS PREVUES POUR 2021, SOIT CE 1% EST UN MENSONGE.
- Dépenses de gestion (près de 50% des dépenses de fonctionnement): + 2% = fonctionnement moins masse salariale)
Pour le BP 2021 : vous nous dites qu’il y aura une progression de 77M par rapport au BP 2020.
Mais si l’on regarde ce qui aura été dépensé en 2020, les chiffres sont très différents ! Vous prévoyez dépenser 120 millions de moins que ce qui a été dépensé cette année.
Quand on voit la liste de tout ce qui a été ouvert au BS, je vous serais reconnaissante de nous dire ce qui pourra être annulé parmi les dépenses supplémentaires de 2020 ??? Dites-nous !
EXTRAIT DU BS :
Est-ce :
- 50,2 M€ pour l’achat d’équipements de protection individuelle ;
- 25 M€ supplémentaires au titre du Revenu de Solidarité Active (RSA);
- 10 M€ de contribution supplémentaire au Centre d’Action Sociale de la Ville de Paris (CASVP) ;
- 9,9 M€ au titre de la désinfection et du nettoyage des locaux ;
- 7 M€ pour la mise à disposition de gel hydro-alcoolique dans l’espace public parisien ;
- 2,4 M€ pour le soutien aux caisses des écoles ;
- l’extension des mesures de gratuité des transports à l’ensemble des Parisiens mineurs (+ 10 M€) ?
PLUS QUE JAMAIS, NOUS DEMANDONS UNE REVUE GENERALE DES DEPENSES ET UN AUDIT EXTERIEUR.
Car en lisant les projets de délibération, Conseil après Conseil, les bras nous en tombent!
On continue à engager des dépenses improductives et inutiles, on continue à vouloir subventionner allègrement la maison d’édition de David Belliard...
Vous nous parlez d’un plan d’1 milliard d’euros pour se baigner dans la Seine.
Vous voulez consacrer 4 millions d’euros à l’agriculture parisienne … et 5 millions pour l’emploi à Paris!
Madame Hidalgo, vous vivez dans un monde parallèle.
Marie-Claire CARRERE-GEE